En 2025, l’Église célèbre les
60 ans de la déclaration Nostra Aetate, texte fondateur du dialogue entre
l’Église catholique et les religions non chrétiennes. Promulguée le 28 octobre 1965 par le pape Paul VI, elle a marqué un tournant décisif dans la relation entre catholiques et juifs.
C’est dans
la
salle des Actes de l’ICP qu’a eu lieu, le mercredi 8 octobre, la séance inaugurale du colloque «
Rêver la fraternité ».
La soirée s’est ouverte par un concert du groupe
Pletzl Bandit, qui a offert au public «
un grand voyage klezmer », une tradition musicale instrumentale des Juifs ashkénazes. Une entrée en musique vibrante et symbolique pour célébrer la richesse des échanges entre traditions et cultures.
À l’issue du concert,
le recteur de l’ICP, Emmanuel Petit, a souhaité la bienvenue aux invités et introduit la soirée en rappelant l’importance de
Nostra Aetate pour l’Institut et pour la tradition intellectuelle et spirituelle qui l’anime.
Il a notamment évoqué
la mémoire de professeurs engagés dans la résistance intellectuelle et spirituelle face à la barbarie nazie, citant Robert d’Harcourt et Yves de Montcheuil, figures emblématiques du refus de l’antisémitisme et de la défense de la dignité humaine
(Replay KTO 01:50).
Cette soirée, organisée conjointement par l’Institut Catholique de Paris, le
Collège des Bernardins et les
Facultés Loyola Paris, en partenariat avec
KTO, a rassemblé des voix majeures du dialogue interreligieux : le
cardinal Kurt Koch, préfet du Dicastère pour l’unité des chrétiens, le Grand Rabbin de France
Haïm Korsia, et
Mgr Étienne Vetö, évêque auxiliaire de Reims.
Leurs échanges, empreints d’amitié et de lucidité, ont offert une relecture inspirante de soixante années de rencontre entre judaïsme et christianisme.
« Rêver ensemble »
Mgr Étienne Vetö a rappelé la pertinence du titre du colloque :
« Le rêve nous tourne vers l’avenir… il est bon de sortir des cadres du temps et de l’espace pour imaginer des solutions nouvelles. »
(Replay KTO 05:00).
« Le rêve est aussi le lieu de la guérison, et celui où Dieu parle. »
Cette invitation à rêver ensemble une fraternité renouvelée a donné le ton d’
une soirée résolument tournée vers l’espérance.
Un tournant historique
« Scrutant le mystère de l’Église, le Concile rappelle le lien qui relie spirituellement le peuple du Nouveau Testament à la lignée d’Abraham »,
rappelait le cardinal Kurt Koch, citant l’article 4 de Nostra Aetate (Replay KTO 09:58).
Il a souligné la double orientation du texte conciliaire : « un non catégorique à toute forme d’antisémitisme, et un oui ferme au patrimoine spirituel commun »
(Replay KTO 16:45).
Ces deux perspectives, affirma-t-il, « ont profondément enrichi le dialogue judéo-catholique et restent d’une brûlante actualité à l’heure où les tensions renaissent ».
« Une nouvelle histoire entre juifs et chrétiens »
Le Grand Rabbin Haïm Korsia a, quant à lui, salué la transformation profonde initiée par Vatican II :
« Il y a une histoire jusqu’à Vatican II, et une nouvelle histoire. Ce n’est pas une évolution, c’est un changement radical. »
(Replay KTO 19:00)
« C’est un véritable acte de fraternité qui nous unit et qui est un rempart contre la perte de soi. »
(Replay KTO 23:00)
Dans un passage marquant,
il a repris les mots du pape Jean-Paul II :
« Vous êtes nos frères privilégiés, en un sens nos frères aînés. »
Puis a ajouté :
« Aujourd’hui, il n’y a plus de malentendu. Que les choses, on se les dit, on les partage. »
(Replay KTO 25:00)
Une fraternité vivante et élargie
Haïm Korsia a également évoqué
la nécessité de maintenir ce lien vivant par des actions concrètes :
« Ce n’est pas un colloque de circonstance, mais un acte de fraternité qui nous unit et qui est un rempart contre la perte de soi. »
(Replay KTO 23:40)
Rappelant les combats partagés sur les questions de dignité humaine, il a conclu :
« Je pense qu’il faut retrouver cette façon de combattre ensemble sur des choses, non pas encore une fois pour faire une forme de syncrétisme, mais pour essayer de défendre une idée de l’humain que nous partageons, je crois. »
(Replay KTO 50:00)
Une conclusion porteuse d’avenir
La soirée s’est achevée sur une note d’espérance et d’engagement.
« Je peux vous souhaiter ce que disait le Rav Kook. Il disait que l’ancien soit renouvelé et que le nouveau soit sanctifié. Eh bien, que l’ancien, que ce texte Vatican II soit renouvelé dans les cœurs et les âmes... »
(Replay KTO 34:00)
Soixante ans après
Nostra Aetate, le rêve de fraternité devient réalité : celle d’un dialogue mûr, confiant et fécond, où juifs et chrétiens avancent ensemble, non dans l’uniformité, mais dans la reconnaissance réciproque.
Replay intégral de la soirée sur KTO
Toutes les photos illustrant cet article ont été réalisées par © Frédéric Albert