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L’islam est-il aussi une religion d’amour ? Pour comprendre, étudiez la "mystique musulmane"

Un nouveau cours donné cette année au sein de l'ISTR, propose de découvrir la dimension mystique et spirituelle de l'islam.

illu article mystique musulane
Face à la diabolisation de l’islam et à la montée de ses courants jurisprudentiels, ce cours propose de découvrir la dimension mystique et spirituelle de cette religion, à travers ses origines, ce qui y est propre et les influences venues d’ailleurs (philosophie néoplatonicienne, christianisme oriental, bouddhisme…).
Y sera abordée cette mystique à partir de l’expérience musulmane de l’amour pour Dieu et de l’anéantissement en Lui. Ses grandes figures et leur grands textes sur l’union mystique et l’amour divin seront nos guides.

>> Douze séances de 2h, le lundi de 11h à 13h, à partir du 15 janvier 2024

Entretien avec le père Charbel Attallah qui nous éclaire sur les enseignements de son cours.

Qu’est-ce que la mystique musulmane ?

Charbel Attallah :
Comme l’affirme Georges Anawati, « la mystique musulmane, désigne le mouvement spécial, appelé en Islam, taṣawwuf (soufisme), et que l’on pourrait définir comme une méthode systématique – une voie – d’union intime, expérimentale, avec Dieu[1] ». Elle est donc une forme d’intimité avec le divin, mais à travers les outils, la théologie et les pratiques propres à l’islam, comme at-tawḥīd/le monothéisme, le Coran, as-Sunna, les cinq piliers, les actes surérogatoires et autres...

Mais pas seulement ! Il est évident que le soufisme est influencé par d’autres mystiques anciennes, chrétiennes, juives, zoroastriennes, bouddhistes et d’autres. Cependant, cela ne fait pas d’elle une simple « copie » ou répétition d’autres mystiques orientales. Malgré les influences manifestes, elle garde quelque chose de propre. Renier à la mystique musulmane son islamité ne peut relever que de la réduction. C’est tout simplement la méconnaître !


Quel est l’objet de votre cours sur la mystique musulmane cette année ?

C.A :
Puisqu’il est impossible d’aborder la richesse des expériences mystiques musulmanes dans un seul cours, les douze séances de cette année chercheront à en approfondir un nouvel angle. Le thème de notre nouvelle aventure est l’union mystique, considérée comme l’aboutissement de la voie spirituelle. Au-delà de ses aspects extatiques, en islam, l’union à Dieu revêt surtout une dimension théologique.
Elle est l’accomplissement de l’unification de Dieu.

Comment, en effet, les théologies mystiques ont-elles défini une telle station de perfection et d’union avec le divin ? Comment la réconcilient-elles avec un monothéisme pur qui refuse toute altérité en Dieu et toute association ? Que devient donc le mystique accompli ? S’anéantira et disparaîtra-t-il nécessairement en Dieu ? Ou s’arrêtera-t-il à jamais sur un seuil de frustration infranchissable et éternelle ? Comment les mystiques musulmans ont-ils éprouvé cette expérience de la mort en Dieu ? Quelques clés et réponses seront données à partir du vécu spirituel de tant de femmes et d’hommes qui ont vu Dieu, L’ont « goûté », L’ont aimé et L’ont préféré à toute chose. Elles seront déduites à travers leurs écrits, leurs biographies et leurs impacts, toujours actuels, sur la riche tradition spirituelle de l’islam.


Quels liens faites-vous entre la mystique musulmane et la mystique chrétienne ?

C.A :
La réponse à cette question trouve déjà ses semences dans celle qui précède. Comme nous l’avons remarqué rapidement, chaque expérience mystique est déterminée par une théologie, par une conception de Dieu.
Quoiqu’on puisse trouver beaucoup de points communs quant à la voie mystique, ses stations, ses étapes et ses pratiques ascétiques anti-ego ou l’âme charnelle, les deux mystiques, musulmanes et chrétiennes se distinguent et divergent au niveau de plusieurs points théologiques fondamentaux. L’expérience de l’Union à l’Amour en constitue l’exemple parfait.

Puisque les deux religions ne définissent, ni ne comprennent, ni ne vivent le monothéisme de la même manière, l’union à Dieu ne peut pas être pareille pour les deux. S’unir à un Dieu Trinité ne peut pas être compris de la même façon que s’unir à l’Un, le Simple. C’est pourquoi il est nécessaire d’éviter le comparatisme théologique tout en soulignant les convergences au niveau des pratiques. Une mystique « comparée » doit donc et en même temps tenir compte des deux dimensions.
Cours ouvert aux auditeurs et accessible en visio.

[1] G. C. Anawati et Louis Gardet, Mystique Musulmane, aspectes et tendances, expériences et techniques, p. 13.

Charbel Attallah
prêtre maronite, le P. Attallah est enseignant à l'Institut Catholique de Paris, au sein de l'Institut de Sciences et de Théologie des Religions (Theologicum - Faculté de Théologie et de Sciences Religieuses) dans lequel il dirige l’axe « Islam ».




 
Lieu(x) :
Publié le 19 octobre 2023 Mis à jour le 6 novembre 2023

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